Se transformer en entreprise agile – Entretien avec Bruno Delas (Société Générale)
La transformation digitale est aujourd’hui au cœur des enjeux de toutes les entreprises, et bouleverse tous les secteurs d’activité. Cette année devrait donc marquer, pour beaucoup d’acteurs, un point d’inflexion. Lors de l'événement Digitagile, coorganisé par DXC et Les Echos, nos intervenants ont exposé les nouveaux enjeux auxquels ils étaient confrontés mais aussi leurs recettes pour réussir la transformation digitale et rendre leur entreprise agile.
Entretien avec Bruno Delas, Chief Operating Officer, Réseaux de banque de détail France de la Société Générale.
Société Générale est l’un des tout premiers groupes européens de services financiers. S’appuyant sur un modèle diversifié et intégré, le Groupe allie solidité financière, dynamique d’innovation et stratégie de croissance durable. Il emploie plus de 148 000 collaborateurs dans 76 pays et accompagne au quotidien 30 millions de clients particuliers, entreprises et investisseurs institutionnels à travers le monde, en offrant une large palette de conseils et de solutions financières sur mesure afin de donner à tous les moyens d’avoir un impact positif sur l’avenir. Bruno Delas, qui a rejoint Société Générale en 2010 comme DSI pour les directions centrales, est depuis janvier 2015 Responsable de l’innovation, des technologies et de l’informatique de la Banque de détail en France.
Comment un groupe de l’envergure de Société Générale a-t-il abordé sa transformation digitale ?
« Pour la transformation digitale, l’impulsion directe du CEO est fondamentale. »
Notre CEO, Frédéric Oudéa, s’est emparé personnellement de la question de la transformation digitale car elle est absolument stratégique pour le Groupe. Pour être en mesure de nous transformer, nous devions nous inspirer culturellement des start-up et cela a pris trois formes. En premier lieu, notre environnement de travail a évolué de façon à refléter les nouvelles façons de collaborer et d’interagir pour que chacun vive la transformation au quotidien.
Ensuite, nous avons été incités à nous ouvrir, à regarder ce qui se fait ailleurs, et des « learning expeditions » ont ainsi été organisées en Chine, en Inde ou dans la Silicon Valley afin de nous imprégner de ce qu’il s’y passe.
Enfin, troisième aspect, le Groupe s’est profondément réorganisé afin de passer d’une structure très centralisée et pyramidale à un fonctionnement beaucoup plus collégial, agile et proche des clients où des service units transversales viennent entourer de leur expertise des business units « cœur de métier ».
Comment l’informatique s’est-elle mise en ordre de marche pour accompagner cette transformation ?
Le point de départ, ce sont les grands enjeux stratégiques des métiers. Dès lors que ces objectifs étaient clairs d’un point de vue business, nous nous sommes demandés comment mener à bien la transformation qu’ils souhaitaient dans et par le système d’information. Ceci a débouché sur un grand projet de transformation de l’informatique pour l’informatique, décliné sur trois grands axes. Le premier consistait à gagner en agilité sur le cœur du développement à l’aide de la technologie, notamment le cloud, qui permet d’accélérer le provisioning des serveurs, et les API, qui facilitent la communication inter-applicatives.
Le deuxième axe, c’était de faire monter les équipes en compétences sur les nouvelles technologies du digital. Enfin, le troisième axe portait sur le volet culturel. Il s’est agi en particulier d’accroître la capacité des collaborateurs à prendre des risques. C’est fondamental si l’on veut travailler en mode agile : s’engager sur des délais très courts et se lancer dans des projets innovants sans avoir tout spécifié en amont.
Quels seraient vos trois conseils pour réussir sa transformation digitale ?
Dans ce domaine, il faut rester très humble car, si toutes les entreprises dans tous les secteurs ont pris le chemin du digital, bien peu peuvent affirmer être arrivées au bout et encore moins avoir le recul nécessaire pour en tirer des enseignements définitifs. Toutefois, si je m’en réfère à notre expérience, je retiendrai trois facteurs qui me semblent déterminants. Premièrement, l’impulsion directe du CEO. Elle est fondamentale et les managers doivent ensuite la relayer afin d’être eux-mêmes les porteurs de la transformation culturelle sur le terrain.
Deuxièmement, la reconfiguration préalable de l’informatique car de son agilité dépend celle des métiers et le time-to-market des nouveaux services. Enfin, troisièmement, il faut une feuille de route qui permette d’avancer, d’acquérir de l’expérience et d’entretenir une dynamique sur des succès visibles.
En ce qui nous concerne, nous avons débuté par la digitalisation des interfaces client. La digitalisation des parcours est un challenge autrement plus relevé car ils traversent transversalement le système d’information. Cela nécessite donc d’avoir suffisamment « APIsé » les applications pour pouvoir chaîner les processus, de disposer d’outils de workflow permettant de les piloter de bout en bout, et d’être en mesure de réconcilier les différents canaux pour offrir au client un parcours omnicanal fluide et cohérent. Commencer par cela, c’est vraiment choisir la face Nord de l’Everest !
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